vendredi 9 novembre 2007

Isaac under arrest : témoignage d'une garde à vue ordinaire

Hier, dans la nuit, j'ai été interpelé pour un contrôle d'alcoolémie banal qui s'est transformé pour moi en un effroyable enfer (les mots sont forts, mais je les assume pleinement).

1. L'arrestation :
contrôle d'alcoolémie positif. L'appareil n'indique pas le taux, les policiers m'indiquent sans ménagement que je vais les accompagner au poste.
Je dois laisser mon scooter au beau milieu du trotoir, en face de l'école militaire.
Super.
Que va-t-il se passer ? je l'ignore encore


2. Le transport
On embarque à l'arrière d'une fourgonnette de la police. Surveillé par un agent. Je prends mon téléphone : sanction verbale immédiate ; comment pouvais-je savoir qu'il était interdit de toucher à sont téléphone ? ... impossible, on ne me dit rien.


3. Arrivée au commissariat du VIIème

Je souffle donc une première fois dans l'éthylomètre : résultat 0.40
J'ignore si c'est bien ou mal et me toune donc vers mes "hotes". Vu leur tête, j'en déduis que c'est pas très bon pour moi.
"Oui, j'ai bu 4 pintes, entre 20h00 et minuit environ" Il est actuellement 3h00 ...

Les agents m'indiquent qu'à 0,39 je peux repartir avec un pv, mais qu'au delà c'est la garde à vur et que je dois passer la nuit au poste. A ce moment du film, cher lecteur, je crois que je ne réalise pas vraiment.
5 minutes passent. Je ressoufle. 0.40 ... pas bon ....
5 minutes encore, 0.42 ! Comment le taux peut-il monter ? Je leur répète n'avoir pas bu depuis plus de 3 heures, et n'avoir pas consommé d'alcool fort.

Mais soudain, les choses s'accélèrent. En quelques minutes, sans ménagement, et sans explication, ma garde à vue est notifiée.

4. Garde à vue.

Je vide mes poches, j'enlève mes lacets, ma montre, ma ceinture, mes lunettes ! "Mr l'agent, sans lunettes je ne vois rien ... Importe peu, c'est la règle" (finalement, suite à une erreur de leur part, je les conserverai).
Notification de garde : avec un "OPJ", officier de police judiciaire.
et ... mise en cellule.

5. La cellule

dans un couloir en enfilade, plusieurs cellules
10 m2 environ. Pas de barreau, mais un plexi très épais. Eclairée au néon. pas de fenêtre.
Un homme est étendu sur un maigre matelas, essayant visiblement de trouver un sommeil impossible.
L'agent me fait pénétrer à l'intérieur "ça fait réfléchir !" Moi, je pense que la question morale je devrais franchement la lui retourner.

6. ...

après une heure environ, où j'essaie péniblement de trouver le sommeil, allongé sur la dalle en béton.
On me tire soudain de mon sommeil pour un interrogatoire.

questions banales, sans rapport avec l'affaire. je ne réalise même pas que je ne sais pas quand cela va cesser, si après tout je n'ai pas droit à un avocat, pas droit à passer un coup de fil.

retour en cellule.

7. Prison Break

7h30. On me sort de la cellule. Empreintes digitales et photos de face, de profil et de 3/4 en tenant une ardoise avec mon nom inscrit dessus accompagné de références kabalistiques.

retour en cellule

8. Panique

Le temps passe. Je fais les 100 pas, m'assied, me relève tente de dormir.
Un agent propose un petit déjeuner. "Non, pas de café ! Biscuit et jus d'orange". Je n'ai de toute façon pas faim. Je suis à dire vrai à la rupture de vomir depuis plusieures heures.
Mon compagnon d'infortune est sénégalais, il parle mal français alors je lui explique qu'un biscuit c'est un petit gateau. Du coup, il en veut bien. Mais l'agent lui répond sèchement qu'elle dit les choses une fois et une seule.
Magnifique.

Le temps passe, sans savoir ce qui doit se passer, ce qui peut se passer. J'ai le sentiment d'être un Joseph K livré à un univers dont j'ignore tout.
L'enfermement me rend de plus en plus mal à l'aise. Je suis en fait absoluement bouleversé.

je sortirais vers 13h00, après 10h00 en cellule.
En lisant cette note, on peut penser que je romance, qu'après tout, ce n'est rien, une anecdote pour plus tard.
Je pourrais le penser. Néanmoins, c'est une expérience très perturbante. A titre personnel bien sur, mai aussi sur la justice, sur la police, et sur ce que j'ai pu entrevoir des conditions de détention.

11 commentaires:

Anonyme a dit…

(rires)

Anonyme a dit…

Je souhaite a Isaac un prompt retablissement apres cette aventure aussi mouvementee qu'interpellante.

Anonyme a dit…

Difficile de trouver des mots. On reste quelque peu interloqué, en lisant cela ... Et on comprend ton bouleversement.

Anonyme a dit…

Prends ça comme une chance d'avoir vu comment ça se passait en matière de police et de justice dans ce pays. Imagine si tu avais été noir, peu éduqué, mal fringué ou de caractère un peu susceptible ...

Anonyme a dit…

OUP's François...mais isaac possède au moins une de ces caractéristiques..:-p
V.Talavera

Isaac a dit…

pour le coup, je suis resté calme ...

Anonyme a dit…

Et encore, nous sommes dans un état de droit....
M'est avis que les agents de la paix devraient être recrutés parmi l'élite de la nation. Trop souvent bornés, enclins à l'abus de pouvoir, que veux-tu, quand on est con....Quant à la question du système pénitentaire français...L'humiliation n'a jamais été un vecteur de redressemnt très efficace, du moins en suis-je intimement convaincue.

0,40, 4 pintes en 4 heures...Heureusement que je me balade exclusivement à pattes et en métro, au vu de ce que je m'envoie chaque soir.Je sais, c'est un problème;)

J'espère que tu t'en remets. Quant à ton compagnon sénégalais... envie de vomir.Je ne conçois ni ne comprends de tels abus de pouvoir.E.T .téléphone maison...!

Isaac a dit…

Rose, merci à toi pour ces remarques.

Anonyme a dit…

ba la vache

Anonyme a dit…

Ah oui effectivement, c'est énorme ce qu'il t'est arrivé !!! J'avais pas réalisé quand tu nous l'as racontées... La quatrième dimension.

Anonyme a dit…

mon pauvre, un vrai monopoli.
Virginie Talavera
(une orange, deux peut être ? )