vendredi 5 mars 2010

De Pierre Soulages et Nespresso

L'exposition Pierre Soulages actuellement présentée par le centre Pompidou se termine le 8 mars. La rédaction invite donc tous ceux qui ne l'ont pas encore vue à s'y rendre.
C'est une remarquable exposition. Elle fait la part belle aux oeuvres les plus récentes, ce qu'on peut néanmoins regretter. La scénographie permet d'avoir le recul suffisant pour regarder les grandes pièces, et les commissaires ont été vigilants à mettre en lumière de différentes façons les "outrenoirs", ces fameuses toiles qui occupent presque toute la production de Soulages depuis 30 ans.
A ne pas manquer donc, d'autant plus que la peinture de l'aveyronnais ne donne rien en reproduction. Il convient donc de voir "in vivo" son travail pour vraiment en profiter.

Mais l'objet principal de cet article n'est pas là. J'ai noté que le principal mécène de cette exposition est "Nespresso", la célèbre filiale caféiné de Nestlé.
Et croyez moi, le hasard n'y est pour rien. En effet, Nespresso est parvenu a fédéré sous son nom une tribu qui ne demandait qu'à avoir un totem. Ce totem prit forme avec l'avènement de la célèbre machine à capsule. Les Nespresso constituent donc un groupe social au même titre que les Bobos, les metrosexuels, les bourges ou les madame Michus ... Qui sont-ils ?
Ils possèdent tous une cafetière à l'éfigie de George Clooney mais en revanche tous les possesseurs de cette dernière ne sont pas des "Nespresso".
Le Nespresso est diablement attentif à son image. L'image qu'il renvoie aux autres conditionne l'image qu'il a de lui-même. Ce qui importe au Nespresso, c'est d'être conforme à des normes esthétiques, intellectuelles, sociales qui semblent constituer un corpus dont le catalogue Nespresso contituerait en quelque sorte la genèse. Suivent alors le catalogue Conran, Habitat pour l'exode, le lévitique ...

Il s'agit de suivre des codes, des commandements qui structurent l'existence.

Le Nespresso est dans la posture. Aimer Soulages est une posture Nespresso. L'art contemporain est chic et "différenciant". J'allais oublier de préciser que le Nespresso vit dans l'illusion d'être à part (comme dirait Charles Dreyfus) et bien entendu, dans la croyance sans faille de sa supériorité sur le quidam. La promesse d'appartenir à un monde exclusif lui a été faite par Nestlé et George Clooney (bis).

Soulages donc. Comme une évidence, le Nespresso trouve très beaux les Outrenoirs (il est content d'ajouter à son vocabulaire "Outrenoir"). Il se prend à réver durant toute l'exposition qu'il se verrait bien accrocher un de ces grands tableaux à coter de son canapé Roche-Bobois. Aquisition qu'il ne manque pas de réaliser dès que son compte en banque le lui permet.
"What else ?" me direz-vous.
Je dis que la nespressisation ne passera pas par moi (je l'espère). En effet, il s'agit là d'une anesthésie du goût et de la liberté. Une tyrannie. Au moins aussi perfide que les très décriés mass media qu'on dit avilissants comme TF1, M6, Voici & Co. L'abrutissement chez les Nespresso ne dit pas son nom. D'autant plus que la victime de ce mal l'ignore toujours. L'alcoolique, au fond, sait bien qu'il boit. Madame Michu passe trop de temps devant sa télévision mais, là encore, elle ne peut pas le nier. Le Nespresso, lui, est fier et inconscient.
Un totalitarisme.
nm.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

éclairez nous encore mon cher Isaac, le "Nespresso" apprécie-t-il les montres de grande manufacture ... Santos de Cartier par exemple ?
bdt

Isaac a dit…

@ Bdt : il peut aimer. C'est tout le paradoxe ;)

(by the way les documents iqp ont-ils été utiles in fine ?)

Anonyme a dit…

Un article qui donne à réfléchir!
Bien vu ;)!